Le réchauffement climatique n’épargne aucun domaine, et la production des eaux-de-vie, notamment leur vieillissement en fûts, n’échappe pas à cette réalité. L’influence des variations climatiques sur les propriétés organoleptiques et la stabilité des produits finis devient un sujet central pour les producteurs soucieux de qualité.
Afin de comprendre les impacts du réchauffement, il est essentiel de revenir sur l’origine des composés qui forment l’essence même des eaux-de-vie.
Après avoir abordé l’origine des composés volatils aromatiques dans les matières premières fermentées (Conséquences du réchauffement climatique sur la qualité et la stabilité des spiritueux – Part 1), cette deuxième partie traite du rôle et de l’importance de la maitrise de la distillation continue ou discontinue sur la qualité de l’eau-de-vie souhaitée.
La dernière partie de ce thème traitera des principales modifications de la constitution physico-chimique que subissent les eaux-de-vie au cours du vieillissement en fûts.
Ce parcours en trois étapes nous permettra de comprendre les effets du réchauffement climatique sur la constitution des eaux-de-vie vieillies sous bois et de proposer des solutions envisageables pour préserver leur qualité.
Modification de la composition en composés volatils
au cours de la distillation continue et discontinue –
Critères de qualité

Rôle de la distillation sur la constitution des eaux-de-vie
La distillation a plusieurs rôles :
- Produire de nouveaux arômes volatils
- Concentrer les composés volatils déjà présents dans la matière première
- Trier pour limiter la présence des composés indésirables
- Piéger certains composés indésirables
1- Composés volatils susceptibles de se former lors de la distillation
Pendant la phase de monter en température, il va se former de nouveaux composés aromatiques en fonction de différents critères : acidité du milieu, apport en lies, temps passé en chauffe, température de chauffe et type de chauffe (gaz, bois, électricité), type d’appareillage, épaisseur de cuivre, mode de distillation, etc…
Ce paragraphe présente les principales familles de composés qui vont se former durant la distillation, ainsi que leurs principaux représentants qui ont avoir un impact sur les propriétés organoleptiques des eaux-de-vie.
1a- Libération des acides gras et des esters d’acides gras provenant des levures
Avant distillation ces composés sont retenus dans les parois cellulaires des levures.
Ils sont principalement libérés lorsque les lies de fermentation sont intégrées à la matière première à distiller.
Ils viennent enrichir le distillat en arômes et en texture. Ce processus est similaire au bâtonnage des vins blancs sur lies, qui contribue à développer des arômes et à apporter de la rondeur au vin.
Les principaux représentants qui ont un fort intérêt aromatique fruité et floral sont les esters d’acides gras : caproate, caprate, caprylate d’éthyle et caprylate et caprate d’isoamyle.
Certains esters plus lourds peuvent créer des problèmes d’odeur indésirable. C’est le cas du Myristate, du palmitate, du linoléate et du linolénate d’éthyle. Les acides gras correspondants peuvent quant à eux créer des problèmes d’instabilité à froid.
L’impact aromatique de ces composés dans les eaux-de-vie est reporté en Annexe 2, en fin de cet article.
1b- Arômes variétaux issus de précurseurs contenus dans la matière première
Certains précurseurs d’arômes non volatils peuvent rester bloqués au niveau de la matière première fermentés, le plus souvent parce qu’ils sont associés à des sucres.
Sous l’effet de la chaleur et de l’acidité du milieu, des phénomènes d’hydrolyse vont permettre de libérer des arômes volatils. Parmi les plus connus issus de raisin ou de fruits fermentés :
– Des terpènes comme le Linalol (notes florales lavande, muguet,…) et le Géraniol (notes de rose et de géranium).
– Ou encore des cétones, comme la béta ionone (violette).
1c- Composés issus des principales réactions chimiques dans la « chaudière »
La chaudière est un vrai réacteur chimique où diverses réactions chimiques, favorisées par la présence de cuivre, peuvent se produire. En voici quelques exemples :
- Estérification : Alcool + Acide <—-> Ester + Eau
- Acétalisation : Alcool + Aldéhyde <—-> Acétal + eau
- Réactions de Maillard : Sucres + acides aminés <—-> Furanes, Pyrazines,…
- Réactions de Strecker qui font intervenir les acides aminés et conduisent à la formation d’aldéhydes, comme l’acétaldéhyde (éthanal)
⇒ Parmi les nombreux composés formés lors de ces réactions et qui ont un impact sur les propriétés organoleptiques, citons tout particulièrement l’acétal et le furfural, communs à toutes les matières premières à distiller et qui peuvent être analysés en routine :
– L’Acétal
Origine : Obtenu par réaction de l’éthanal avec l’éthanol, les sources d’éthanal favorisent la formation d’acétal.
- Le sulfitage de la matière première ou durant la fermentation, utilisé pour inhiber des risques d’altération, contribue à la formation d’éthanal.
- En présence de sucres résiduels (Glucose, Fructose), la chauffe provoque une dégradation thermique, conduisant à la formation d’aldéhydes légers comme l’éthanal.
- L’éthanal peut aussi se former par réaction de Maillard ou de Strecker.
Impact aromatique : Il contribue aux notes de fruits secs. Mais, à forte concentration (> 50mg/), il va masquer des notes subtiles, voir être perçu comme de l’alcool à brûler.
En conséquence, en présence d’éthanal, l’acétal sera produit durant la distillation. Par réaction avec l’éthanol, l’acétal va continuer à se former lors du stockage et du vieillissement des eaux-de-vie.
– Le Furfural
Origine : La principale source de production de furfural lors de la chauffe est la dégradation thermique des pentoses (sucres non fermentescibles), qui conduit à la formation de cet aldéhyde aromatique.
Les matières premières fermentées qui contiennent le plus de pentoses sont généralement dérivées de matériaux végétaux riches en hémicellulose, ce qui est rarement le cas pour la majorité des spiritueux, qui sont souvent produits à partir de sources plus riches en hexoses (amidon, saccharose).
Le furfural peut également se former en petites quantités par des voies indirectes, telles que la réaction de Maillard en présence de sucres résiduels (glucose, fructose, et pentoses).
Impact aromatique : Les faibles doses de furfural produites lors de la chauffe n’ont pas d’incidence négative sur l’eau-de-vie ; au contraire, elles contribuent positivement au bouquet aromatique de celle-ci.
⇒ Parmi les principaux esters générés par réaction entre les différents alcools et acides du milieu, citons des arômes fruités qui peuvent être analysés en routine :

2- Concentration des composés volatils lors de la distillation
La distillation permet une évaporation sélective : les caractéristiques de cette évaporation dépendent du type de distillation. Ce sujet est développé dans le paragraphe suivant « les différents principes de distillation et impact sur les composés volatils ».
En éliminant un maximum d’eau, la distillation permet d’augmenter les teneurs en alcool et en arômes. Cependant, elle risque aussi d’amplifier les défauts de la matière première à distiller, d’où la nécessité de faire intervenir un tri lors des distillations.
3- Tri des composés volatils lors de la distillation
Qu’il s’agisse de prélever des « têtes » ou des « queues », de réaliser des prélèvements sur certains plateaux de distillation, ou encore via le mécanisme de reflux dans les colonnes de distillation, le tri doit avoir pour objectif de limiter les défauts de la matière première tout en optimisant la concentration de certains composés aromatiques.
Pour que le tri soit efficace, il faut prendre en compte, non seulement le type de distillation, mais la connaissance du mode de passage des principaux composés volatils. Sujet abordé dans le paragraphe suivant « Les différents principes de distillation et impact sur les composés volatils »
4- Captation de certains composés indésirables par le cuivre
– Les composés soufrés
Les composés soufrés (comme le méthanethiol, l’éthanethiol, et le trisulfure de diméthyle) à odeur très puissante à très faible dose, peuvent être captés sur les parties en cuivre des appareils à distiller. Ils vont précipiter sous forme de sulfure et pouvoir être filtrés.
– Les acides gras
Les acides gras les plus lourds, peuvent s’insolubiliser lorsque le taux d’alcool devient trop faible. Ils peuvent donc créer des problèmes d’instabilité dans les produits finis, voir rancir. En étant captés par réaction avec le cuivre, ils forment des complexes qui vont précipiter et pouvoir être filtrés.
Il est donc nécessaire de bien entretenir les parties cuivrées pour que leur efficacité soit au maximum.
Les différents principes de distillation et leur impact sur la composition en composés volatils des eaux-de-vie
La distillation des spiritueux, comme les eaux-de-vie de vin, les eaux-de-vie de fruits, le rhum, le whisky et la téquila, peut être réalisée de différentes manières selon les traditions, les réglementations et les objectifs du producteur : Distillation discontinue en une seule passe ou à repasse, distillation continue en colonne.

Les différents types de distillation n’ont pas les mêmes effets sur la concentration, le tri et l’élimination de composés indésirables. Cependant, ils partagent les principes fondamentaux suivants :
1- Points communs aux différents types de distillation
– L’éthanol est plus volatil que l’eau
Il s’évapore plus facilement que l’eau, ce qui permet de l’enrichir progressivement dans les vapeurs lors de la distillation. Cependant, il existe une interaction particulière entre l’eau et l’éthanol, appelée phénomène d’azéotropie.
– L’éthanol et l’eau s’associent : Phénomène d’azéotropie
L’eau et l’éthanol forment un mélange dit azéotropique, dont le point d’ébullition (78,15 °C) est légèrement inférieur à celui de l’éthanol pur (78,43 °C). Ce phénomène limite la concentration maximale d’éthanol pouvant être atteinte par distillation simple à 96,5 % vol. (sous pression atmosphérique normale). Au-delà de cette concentration, les vapeurs d’éthanol et d’eau ont la même composition, ce qui rend impossible une séparation supplémentaire sans les techniques spéciales, utilisées pour produire de l’alcool neutre.
– La concentration en éthanol, dans les vapeurs, évolue au fur et à mesure de la distillation
Au début de la distillation, les premières vapeurs sont riches en éthanol. Avec la montée en température dans la chaudière, l’éthanol s’appauvrit progressivement dans les vapeurs, à mesure que les composés les moins volatils (comme l’eau) deviennent plus dominants. Cette évolution dépend du type de distillation (continue ou discontinue) et la conduite de distillation.
– Le taux de passage, dans la phase vapeur, diffère selon les composés volatils
Les vapeurs formées ne contiennent pas uniquement de l’eau et de l’éthanol, mais aussi d’autres composés volatils. Ces composés sont entraînés en fonction de :
- Leur température d’ébullition : Les composés avec un point d’ébullition inférieur ou proche de celui de l’éthanol, comme l’éthanal (acétaldéhyde), se concentrent dans les premières fractions.
- Leur affinité avec l’éthanol : Certains composés, comme l’acétate d’éthyle et l’acide acétique, même s’ils ne sont pas très volatils, peuvent être entraînés par les vapeurs d’éthanol en raison d’interactions moléculaires.
Le Méthanol est une exception : Composé très volatil (point d’ébullition : 64,7 °C), il est entraîné dans le sillage de l’éthanol tout au long de la distillation. Ceci, en raison de sa volatilité proche de celle de l’éthanol et de son affinité chimique pour l’éthanol. SEn outre, piégé dans les pectines de certaines matières premières, il peut s’en libérer au fur et à mesure de la distillation.
En raison de sa toxicité, les réglementations internationales imposent des limites maximales de méthanol dans les spiritueux. Par exemple, 200 g/hl AP pour les Eaux-de-vie de vin produites dans l’Union Européenne [1].
Il est difficile de le limiter par la distillation, cela nécessite des équipements spécifiques.
Il est préférable de le contrôler dans la matière première à fermenter. Se référer à l’article du blog : Conséquences du réchauffement climatique sur la qualité et la stabilité des spiritueux – Part 1
2- La distillation discontinue à repasse – Qualité des eaux-de-vie
2.1 Principe
Elle consiste à effectuer une première distillation avec prélèvements d’un certain volume de têtes, de cœur et de queues. Elle est appelée à « repasse », car le cœur de la première distillation est de nouveau distillé avec éventuellement des fractions de têtes et de queues.
Intérêt de redistiller le cœur :
Le taux d’alcool maximum pouvant être atteint dans le cœur de la première distillation est limité. Pour obtenir un un taux d’alcool plus élevé, la « repasse » est nécessaire. De plus, le recyclage des têtes et queues dans le cœur de distillation permet de complexifier le produit à distiller. Cet assemblage prend le nom de « Brouillis ». Il a un taux d’alcool typique de 25 à 35 % vol.
Lors des deux distillations, le taux d’alcool dans les vapeurs est au maximum au début de la distillation, puis diminue pour atteindre quelques %. Tandis que le liquide dans la chaudière s’appauvrit en alcool, l’eau y devient majoritaire.
2.2 Effet sur la concentration
Elle permet de concentrer l’alcool en règle générale jusqu’à un facteur 10, avec un taux d’alcool maximum dans l’eau-de-vie typiquement entre 70 et 85 % vol.
2.3 Effet du tri
Le prélèvement de têtes et de queues de distillation lors de la première et deuxième chauffe permet de limiter certains défauts de la matière première fermentée.
Une partie de ces prélèvements peut être recyclée soit dans le produit à distiller de la première chauffe suivante, soit dans le brouillis.
Grâce à ces différents prélèvements et leur éventuel recyclage en distillation, le tri peut être très efficace pour corriger en finesse les défauts organoleptiques occasionnés par des composés volatils en trop forte concentration.
2.4 Principaux paramètres de la distillation à repasse qui interviennent sur la constitution des eaux-de-vie
- Forme et matériau de l’alambic
- Température de l’eau du réfrigérant et qualité de l’eau
- Température de chauffe et vitesse de coulage
- Volume de Prélèvements de têtes et de queues
Forme de l’alambic
Elle joue un rôle crucial dans le processus de tri lors de la distillation :

Hauteur et inclinaison du col influencent la purification des vapeurs.
Un col haut favorise la séparation et le reflux, ainsi qu’une inclinaison haute.
Largeur et forme de la chaudière affectent la douceur de l’évaporation. A capacité égale, plus elle est large, plus la surface d’évaporation est grande et plus l’évaporation est douce et homogène.
Présence d’un chapiteau (forme de l’épaulement). Un chapiteau en forme d’oignon ou de dôme provoque un effet de condensation partielle des composés lourds, favorisant un reflux naturel et une meilleure purification des vapeurs. Une forme plus droite ou angulaire permet aux vapeurs de passer plus directement, augmentant la présence de composés lourds dans le distillat.
Conclusion sur les effets de la forme de l’alambic
Le reflux naturel induit par la forme globale détermine la richesse ou l’épuration du distillat. Une forme favorisant un reflux important conduit à un distillat plus épuré, tandis qu’un reflux réduit favorise un distillat plus riche et complexe.
Le choix de la forme d’un alambic dépend du type de spiritueux souhaité : allant d’un distillat léger et épuré à un distillat complexe et riche en arômes. Chaque détail de conception contribue à la spécificité du produit final.
Matériau et épaisseur
Le type de matériau et son épaisseur influencent :
L’échange thermique
Une paroi fine favorise un chauffage rapide, tandis qu’une paroi épaisse diffuse la chaleur plus lentement et uniformément.
Une diffusion lente peut permettre une montée en température plus contrôlée, influençant la qualité du tri.
Les réactions chimiques
Le cuivre piège certains composés indésirables, comme les composés soufrés.
Il joue le rôle de catalyseur de certaines réactions, comme les réactions entre les alcools et les acides produisant des esters aromatiques (ex: acétate d’isomyle à odeur de banane).
La température de chauffe
Elle a une forte influence sur l’évaporation ou le captage de certains composés au niveau des porte-alcoomètres :
– Réglée trop chaude, elle va permettre d’évaporer les composés volatils les plus agressifs, mais laisser passer trop d’acides gras lourds qui peuvent entraîner de la lourdeur.
– Réglée trop froide, cela peut appauvrir sa complexité aromatique.
La capacité à maitriser cette température passe par la maitrise des températures de refroidissement et donc du matériel utilisé pour produire l’eau et contrôler sa température.
La vitesse de coulage
La vitesse de coulage va favoriser ou repousser l’arrivée des secondes (fraction entre le cœur et les queues, qui contient la majorité des esters et acides gras aromatiques) ;
– Plus la vitesse est lente, plus l’arrivée des secondes chargées en corps gras est repoussée.
– Inversement en augmentant la vitesse de coulage, l’arrivée des secondes est plus rapide.
Pour obtenir de bons résultats lors d’une distillation en présence de lies, la vitesse de distillation doit être assez lente :
– Meilleure séparation entre les têtes et les secondes.
– Meilleure récupération des esters d’acides et acides gras qui vont donner la structure attendue.
L’expert Marc GIBOULOT nous précise le point suivant : « en Double distillation en alambic une vitesse de distillation lente et une coupe d’eau de vie haute (entre 61-63 %vol) permet de limiter l’arrivée des secondes ce qui est plus compliqué en distillation colonne Armagnacaise. »
La qualité de l’eau
Par utilisation d’une eau trop calcaire, les circuits d’eau peuvent s’entartrer progressivement et réduire l’efficacité du refroidissement.
2.5 Volume de prélèvements de têtes et de queues – Recyclage de ces prélèvements
Les quantités à prélever de têtes et de queues dépendent de la bonne connaissance l’appareil et de la connaissance du profil en composés volatils de la matière première fermentée.
Certains distillateurs expérimentés sont capables de piloter, par dégustation et évaluation olfactive, le changement de destination du distillat en train de couler.
En l’absence de cette expérience ou du support d’un spécialiste pour régler l’appareil et déterminer le processus de distillation, il devient essentiel de :
– Analyser les principaux composés volatils de la matière première.
– Etudier les taux de passage de ces composés, en fonction des réglages de l’appareil s’impose.
Cette approche donnera les clés qui vont permettre d’optimiser le tri en fonction de la qualité souhaitée.
2.6 Exemples de comportement de certaines familles de composés lors de la distillation et impact du tri
Aldéhydes : Ethanal – Acétal
Ces composés passent principalement dans les têtes de distillation. En cas d’excès dans la matière première, Il est possible d’en éliminer par prélèvement des têtes.
Esters légers (acétate d »éthyle) – Esters d’acides gras et acides gras
En raison de leur affinité avec l’éthanol, la majorité des esters légers et acides gras ont un taux de passage qui diminue au fur et à mesure de la distillation.
Un excès d’élimination des têtes peut entraîner la perte d’une part importante du potentiel aromatique de ces composés.
À l’inverse, le taux de passage des acides gras a tendance à augmenter au cours de la distillation. Par conséquent, une élimination excessive des queues peut priver l’eau-de-vie de leur contribution à la rondeur et à la texture.
Lactate d’éthyle – Succinate d’éthyle
Leur taux de passage augmente lors de la distillation. Ils peuvent être pris en compte comme marqueurs de taux de queues dans les eaux-de-vie.
Alcools supérieurs
La plupart des alcools supérieurs passent principalement dans le cœur de la distillation. Une fois présents en excès, il devient difficile de les éliminer, ce qui peut nuire à la qualité finale du produit, la rendant un peu lourde, voir végétale.
2.7 Le tri a ses limites
Compte tenu de ce qui vient d’être énoncé, si le tri n’est pas effectué en fonction de la composition de la matière première, cela peut entraîner :
– La perte de composés aromatiques essentiels, comme les esters d’acides gras.
– Laisser passer des composés indésirables qui peuvent altérer la qualité de l’eau-de-vie.
Pour illustrer ce propos, des exemples de mode de passage, des principaux composés volatils en distillation type Cognac, sont donnés à titre indicatif, en ANNEXE 1.
2.8 Conclusion sur la distillation discontinue à repasse et la qualité des eaux-de-vie
A partir d’une matière première de qualité, la maîtrise des réglages de fonctionnement de l’appareil à distiller et un tri effectué en tenant compte de sa composition, elle est susceptible de produire des eaux-de-vie très raffinées.
Pour en savoir plus sur la Distillation à repasse
Se référer aux références bibliographiques citées en fin d’article.
3- La distillation discontinue sans repasse
3.1 Principe
Elle consiste à effectuer une seule distillation avec prélèvements d’un certain volume de têtes, de cœur et de queues.
3.2 Principales différences avec la distillation à repasse
– Ces appareils sont principalement utilisés pour la production d’eaux-de-vie issues de fruits, de marcs ou de macérations de plantes. Leur utilisation est souvent privilégiée pour des productions artisanales en raison de leur rendement limité, ce qui les rend moins adaptés à l’industrialisation.
– Pour obtenir des eaux-de-vie complexes et sans repasse à un taux d’alcool élevé, une conception spécifique de l’appareil est nécessaire (Exemples : Alambic Stupfler®, Pot Still avec colonne intégrée, et Alambic Muller). Ces équipements permettent de combiner la simplicité de la distillation sans repasse avec une grande précision dans le fractionnement des composés.
– La chauffe est généralement réalisée au bain-marie, parfois à la vapeur directe ou indirecte, et rarement au gaz. Ces modes de chauffage offrent une répartition uniforme de la chaleur, ce qui limite les risques de « rimé » (brûlures ou surchauffes) pour les produits riches en extraits secs, comme les marcs ou les fermentations issues de fruits tels que les prunes, poires, ou cerises.
– Les réglages de ces appareils sont souvent plus simples : maintenir une température proche de 100 °C à la base de la colonne garantit un passage complet de l’alcool. Certains appareils sont néanmoins équipés d’un déflegmateur hydraulique, qui optimise la séparation des composés volatils en ajustant le reflux. Cet accessoire permet, par exemple, de retenir les composés plus lourds dans les parties inférieures de l’appareil, tout en augmentant le taux d’alcool du distillat.
– Comme pour la distillation à repasse, l’efficacité du tri entre les têtes, le cœur et les queues dépend fortement de la conception de l’alambic : la forme de la chaudière, le principe et le type de colonne de rectification, ainsi que les réglages influençant la dynamique du reflux jouent un rôle crucial.
3.3 Conclusion sur la distillation discontinue sans repasse et la qualité des eaux-de-vie
A partir d’une matière première de qualité, la maîtrise des réglages de fonctionnement de l’appareil à distiller et un tri effectué en tenant compte de la composition de la matière première, elle est susceptible de produire des eaux-de-vie très raffinées.
L’investissement peut-être plus couteux. Mais avec un rendement élevé et un coût énergétique moindre que la distillation à repasse, le choix de cette méthode dépend principalement du type de spiritueux à produire et des objectifs de production.
4- La distillation continue
4.1 Principe
La distillation continue repose sur un flux ininterrompu de matière première à travers une colonne de distillation, permettant une séparation constante des différents constituant. Le mélange à distiller est introduit en continu dans la colonne, où il traverse des plateaux de rectification successifs.
– L’alcool et les composés volatils sont entraînés vers le haut de la colonne sous forme de vapeur.
– Les résidus lourds (comme l’eau) descendent et sont évacués en bas de la colonne.
– À chaque niveau de la colonne, une condensation partielle des vapeurs permet un échange avec le liquide, favorisant une concentration progressive en alcool à mesure que la vapeur s’élève.
4.2 Effet sur la concentration
La distillation continue permet d’atteindre des concentrations élevées en alcool, souvent supérieures à celles obtenues en distillation discontinue, grâce à la rectification continue sur chaque plateau. En fonction de la conception de la colonne et du nombre de plateaux, l’alcool peut être concentré jusqu’à 96 %, idéal pour la production d’alcools neutres.
4.3 Effet du tri
En distillation continue, l’optimisation du tri des composés volatils repose principalement sur les réglages précis et constants de la colonne. Ces réglages incluent :
– Nombre de plateaux
– Température
– Débit des flux de liquide et de vapeur
– Conditions de reflux
Contrairement à la distillation discontinue, où les prélèvements manuels permettent un tri direct des fractions, la distillation continue repose sur une séparation automatique et continue des composés à différents niveaux de la colonne.
La séparation des têtes, du cœur et des queues se fait en continu, chaque composé étant extrait à un niveau spécifique de la colonne en fonction de son point d’ébullition. Le contrôle précis de la température et de la pression permet d’ajuster la concentration des différents constituants du distillat en fonction des caractéristiques souhaitées pour l’eau-de-vie.
Exemple : Plus une colonne possède de plateaux, plus la différence de température entre le premier et le dernier plateau est importante, et plus le reflux est efficace pour affiner le tri des composés volatils.
4.4 Conclusion sur la distillation continue
Elle a de nombreux avantages financiers par rapport à la distillation discontinue :
- Investissement moins lourds
- Rendement élevé, avec une production continue
- Réduction des coûts de main-d’œuvre
- Moins de pertes de matières premières
- Economies d’énergie
La distillation continue présente des limitations lorsqu’il s’agit de récupérer des composés lourds et structurants, tels que les acides gras ou leurs esters, essentiels à la complexité aromatique. En raison de leur faible volatilité, ces composés tendent à se concentrer dans les plateaux inférieurs ou à rester piégés dans les résidus de la colonne.
Un exemple : lors d’une tentative de récupération de certains esters d’acides gras aux propriétés aromatiques bonificatrices, j’ai constaté qu’un composé indésirable, l’alcool allylique aux propriétés agressives, se retrouvait au même niveau d’extraction. Dans ce type de colonne, préserver les composés aromatiques bonificateurs requiert une gestion rigoureuse des bactéries dès la fermentation, afin de limiter la production de composés indésirables comme l’alcool allylique. Pour plus de détails sur l’origine de ce composé, consultez l’article du blog sur les composés volatils issus de la fermentation : Conséquences du réchauffement climatique sur la qualité et la stabilité des spiritueux – Part 1
Pour en savoir plus sur la Distillation continue : Se référer aux références bibliographiques citées en fin d’article.
C onclusions sur l’impact du choix d’un appareil à distiller sur la constitution des eaux-de-vie
Des centaines de composés volatils peuvent se retrouver dans les eaux-de-vie. C’est l’équilibre harmonieux de ces composés qui procure aux produits la qualité souhaitée.
Quel que soit le type de distillation, celle-ci ne pourra pas corriger les défauts majeurs de la matière première à distiller, sans nuire à la constitution de l’eau-de-vie. L’optimisation d’une distillation passe donc par une optimisation de la qualité de la matière première fermentée et le contrôle de cette qualité.
P lages de concentrations des composés volatils à respecter
Outre les règlementations liées à des appellations, qui précisent soient des minimums soient des maximums, il est difficile de donner des consignes précises sur les plages de concentrations des composés volatils à respecter, sans savoir à quoi sera destinée cette eau-de-vie : à élaborer de la « Blanche », à vieillir en fût et pour quelle durée ?
Du coup, la définition d’un profil en composés volatils peut varier significativement en fonction des caractéristiques du produit final prévu pour sa commercialisation.
Etapes clés pour définir un profil approprié en composés volatiles :
- Commencer par se référer aux cahiers des charges analytiques des appellations et en particulier le cahier des charges imposé par la règlementation européenne ou celle du pays d’exportation, voire de l’importateur ou de votre client.
- Définir le ou les profils souhaités, compte tenu des attentes de vos clients. Pour cela, prendre en compte les profils des produits qui ont du succès et au besoin disposer des analyses sur les produits déjà commercialisés et qui s’approche de votre cible.
- Prendre en compte l’état de vos stocks (eaux-de-vie en affinage ou en vieillissement, etc..) pour définir les besoins.
- Disposer des analyses des principaux composés volatils, des eaux-de-vie fraîchement distillées et des notes de dégustation.
- Avoir une idée de l’évolution des propriétés organoleptiques des eaux-de-vie, lors de l’affinage ou du vieillissement sous bois.
Exemples :
– Pour une commercialisation en « Blanche », les composés de têtes très volatils et agressifs (comme l’acétaldéhyde, l’isobutanal, l’acétal), les alcools supérieurs et les composés lourds (comme les acides gras) ne devront pas être en excès. En contre partie, un peu d’esters d’acides gras apportera de la suavité (exemple ente 20 et 30 mg/l pour un produit finalisé à 40% vol.).
– Une eau-de-vie fraîchement distillée qui semblera « savonneuse » en raison d’un excès d’esters d’acides gras n’aura peut-être pas d’intérêt pour une commercialisation en « blanche ». Par contre, au cours du vieillissement elle pourra développer des arômes complexes de fleurs, de fruits, etc.., tout en apportant de la suavité.
Remarque:
Pour une mise en vieillissement sous bois, la composition en composés volatils conseillée va dépendre de la durée de vieillissement, du type de bois (fûts neufs ou fûts roux), le type de bois (grains fins ou dits « grossiers), taille du fût, type de chauffe, etc…
De plus, Il faut tenir compte de l’évolution de ces composés lors du vieillissement sous bois : évaporation des composés légers, concentration, apport du bois, réactions chimiques, etc….
C’est toute l’expérience du Maître de chai ou encore du Maître assembleur de définir des objectifs de profil des eaux-de-vie à élaborer et de savoir exploiter les résultats d’analyses.
Le recours à l’assemblage des eaux-de-vie lui permet de moduler les profils à sa convenance. Découvrir OPTIMIX !

Si vous ne disposez pas de critères qualitatifs ou de l’expérience nécessaire, se rapprocher de consultants comme Marc GIBOULOT, Ludwig VANNERON, Thierry ARCHEREAU qui grâce à la dégustation et les analyses pourront vous aider à définir ces critères.
Des formations spécifiques sont dispensées au CIDS de Segonzac (France).
A la fin de cet article, l’ANNEXE 2, présente une synthèse, non exhaustive, des principaux composés volatils pouvant être analysés en routine et/ou facilement détectables en dégustation (comme les composés soufrés). Il précise l’impact organoleptique sur les eaux-de-vie juste distillées. Il donne, à titre indicatif, les teneurs maximales recommandées pour garantir une eau-de-vie exempte de défauts majeurs et le comportement en distillation à repasse
L’ANNEXE 3, présente une synthèse, non exhaustive, des principaux descripteurs organoleptiques des eaux-de-vie et les principaux composés volatils pouvant être en corrélation avec ces descripteurs.
Pour optimiser vos assemblages d’eaux-de-vie, un nouvel outil « OPTIMIX»
L’assemblage des eaux-de-vie issues de la distillation constitue un excellent moyen d’atteindre le profil souhaité, que ce soit pour une mise en production sans ou avec vieillissement sous bois.
A l’aide des caractéristiques analytiques et notamment des analyses des principaux composés volatils, il est possible d’optimiser cet assemblage.
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Un article du Blog est consacré à l’intérêt de réaliser des assemblages avec Optimix et liste quelques exemples pratiques d’applications : Optimix: un outil pour optimiser vos assemblages
Impact du réchauffement climatique sur la constitution des eaux-de-vie
Cet article et le précédent ont examiné l’origine des principaux composés volatils responsables des propriétés organoleptiques des eaux-de-vie fraîchement distillées. Ils ont également fourni des clés pour maîtriser leur profil de concentration, afin d’obtenir la qualité souhaitée du produit final, tout en s’appuyant sur notre expérience de l’évolution des eaux-de-vie lors de leur affinage et vieillissement.
Cependant, le réchauffement climatique peut fortement influencer les processus physico-chimiques de maturation en fûts et nécessiter l’ajustement du profil de ces eaux-de-vie.
Comme annoncé en introduction, le troisième article présentera les transformations majeures que subissent les eaux-de-vie lors du vieillissement sous bois, afin de mieux comprendre et anticiper les impacts liés à l’élévation des températures dans les chais de stockage.
Je remercie les experts en spiritueux suivants pour leur contribution à la rédaction de cet article :
Ludwig VANNERON, Marc GIBOULOT, Thierry ARCHEREAU
Cet article vous a plu, il suscite un besoin de complément d’informations, des correctifs, n’hésitez-pas à m’en faire part.
Evelyne CHANSON – Consultante en Contrôle Qualité Vins & Spiritueux – EC Consulting
ANNEXE 1 : Mode de passage, des principaux composés volatils en distillation type Cognac
Légendes : (a) 1ère chauffe – (b) Bonne chauffe

ANNEXE 2 :
Ce tableau récapitule pour chaque famille, l’origine, le comportement de passage en distillation et l’impact organoleptique dans une eau-de-vie, de chacun des composés et donne quelques clés sur les plages de concentration pour obtenir une eau-de-vie considérée sans défaut majeur.
Rappels :
– Les origines de ces composés dans les produits fermentés sont récapitulées dans le tableau de synthèse en annexe de l’article sur les les composés volatils issus de la fermentation : Conséquences du réchauffement climatique sur la qualité et la stabilité des spiritueux – Part 1).
– Les teneurs maximums conseillées, dans les eaux-de-vie juste distillées, dépendent fortement du type de spiritueux à produire. Au besoin, se rapprocher d’un expert pour afiner les plages de concentration à respecter.

ANNEXE 3 : Principaux descripteurs organoleptiques des eaux-de-vie et principaux composés volatils pouvant être en corrélation avec ces descripteurs.
Les cellules grisées mettent en évidence les correspondances possibles entre les descripteurs organoleptiques des eaux-de-vie et les composés volatils.
(*) Composés qui nécessitent des analyses spécifiques, autre que les analyses de routine par injection directe en chromatographie en phase gazeuse, couplage FID. Voir le paragraphe dédié à cette technique d’analyse dans l’article du Blog : Conséquences du réchauffement climatique sur la qualité et la stabilité des spiritueux – Part 1 – ou cliquer directement ici GC-FID


Bibliographie
[1] RÈGLEMENT (UE) 2019/787 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL du 17 avril 2019. « concernant la définition, la désignation, la présentation et l’étiquetage des boissons spiritueuses,.. ».
[2] « From Vine to Cognac » – R. Cantagrel, B Galy – Tiré du livre Fermented Beverage Production – Second edition, 2003, édité par Andrew G.H. Lea et John R. Piggott.
Pour en savoir plus sur :
– Les principes de la distillation : « Distillation des mélanges eau-alcool » – Revue des œnologues N° 106, Martine DECLOUX.
– La Distillation du Cognac : « Etude chimique de la distillation du Cognac » – Bulletin de l’Union des physiciens – Vol. 96, 2002, Jérôme SOURISSEAU.
– L’Influence de l’anhydride sulfureux et de la lie sur la qualité du Brandy distillé en chaudière : article tiré du livre de Alain BERTRAND » Les eaux-de-vie traditionnelle d’origine viticole »- LAVOISIER – 27/07/2007 – Chapitre 7 – Maria Soleda JURADO, Belen PUERTAS et al.
– L’effet du cuivre sur la qualité des eaux-de-vie : « Dimethyl sulphide and the sensory characteristic defect of caçacha distilled in the absence of copper » du livre Distillated spirits – Tradition and Innovation – Chapter 31 – J.B. Faria, V. Ferreira, R. Lopez and J. Cacho.
– Classification des défauts les plus fréquents dans les eaux-de-vie et mesures préventives : « Les défauts dans les eaux-de-vie », ACW 2009, Feuille d’information 7 , Sonia Petignat-Keller, ACW Extension Destillate.
– Les teneurs en esters d’acides gras à longue chaîne dans les eaux-de-vie d’Armagnac : article tiré du livre de Alain BERTRAND » Les eaux-de-vie traditionnelle d’origine viticole » – LAVOISIER – 27/07/2007 – Chapitre 8, Eric HERVE, Marie-Claude SEGUR et Alain BERTRAND.
– L’importance de la maîtrise des températures de coulage sur la distillation en alambic à repasse : « DISTILLATION ET MAITRISE DES TEMPERATURES DE COULAGE » – Le Paysan Vigneron 26 juin 2009 .
– Les Enjeux de la distillation sur le profil aromatique du whisky distillé à la repasse : se référer au « Livre de Chai – LA DISTILLATION DANS LA PRODUCTION DE WHISKY » de la Maison LINETI rédigé par Magali PICARD.
– Les composés d’arôme du rhum traditionnel blanc : « Nature, propriétés sensorielles et voies de formation » – – Ind. Alim. Agr. 124 (7/8) 20-29 (2007), Julie Coustel, Pierre Giampaoli, Martine Decloux.
– La qualité des eaux-de-vie de fruits en relation avec celle de la matière première (prunes, pêches, abricots) : « Elaboration et connaissance des spiritueux – Recherche de la Qualité, Tradition et Innovation » – Roger CANTAGREL – Edition BNIC – 1er Symposium international de Cognac du 11 au 15 mai 1992, p234, R. CAMPEANU, MARA JONESCU, VALERIA IONITA, I GAVRIILESCU.
– Les composés volatils dans les eaux-de-vie de cidre : « Elaboration et connaissance des spiritueux – Recherche de la Qualité, Tradition et Innovation » – Roger CANTAGREL – Edition BNIC – 1er Symposium international de Cognac du 11 au 15 mai 1992, p355, « Estimation de la composition d’une eau-de-vie de cidre par analyse rapide du cidre de distillation », S. LESMELE, F. DOREY, S. LE GUENNEC, JM. LE QUERLER, J.F. DRILLEAU.
– Les composés volatils de la Téquila : « Flavor and Chemistry of Wine and Other Alcoholic Beverages » – p243. Pedro A. Vasquez-Landaverde, Miriam G. Rodriguez-Olvera.
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