Dans les articles de ce blog, je cite régulièrement la dégustation comme outil de contrôle qualité. Cependant, pour obtenir des résultats fiables et reproductibles lors de la dégustation de spiritueux et tout particulièrement les eaux-de-vie issues de produits fermentés, certaines bonnes pratiques doivent être respectées.
De l’environnement de dégustation aux méthodes d’évaluation sensorielle, voici les clés pour une analyse optimale et rigoureuse.

Bonnes Pratiques de Dégustation des Spiritueux
Commencer par bien préparer sa dégustation
• Évitez de déguster dans le chai, car les odeurs ambiantes peuvent altérer les perceptions. Privilégiez une pièce neutre et réalisez la dégustation à des moments optimaux, comme avant le déjeuner.
• L’analyse olfactive peut se faire au taux d’alcool naturel de l’eau-de-vie. Toutefois, il est recommandé de réduire l’eau-de-vie à environ 40 % vol. avec une eau la plus neutre possible, que ce soit pour augmenter vos performances de dégustation olfactive et pour une dégustation en bouche,
Pour cela, utilisez une éprouvette de 50 ml ou 100 ml. La Boxette de Labox « Réduction-Remontage » vous aidera à calculer la quantité d’eau à ajouter avant de compléter à 50 ou 100 ml.
• Utilisez des verres droits, type INAO de 125 ml, Assurez-vous qu’ils soient parfaitement propres et exempts d’odeurs résiduelles (liquide vaisselle, calcaire, poussière). Un rinçage à l’eau chaude et un séchage à l’air libre sont recommandés. Les remplir au maximum au tiers de leur capacité.
• Masquer la couleur si nécessaire. Pour un jugement basé uniquement sur les propriétés organoleptiques (arômes et sensations en bouche), il peut être préférable de masquer la couleur du spiritueux. Pour cela, entourez le verre avec un papier opaque, maintenu par un élastique.
• Préparer un verre d’eau la plus neutre possible.
• Ne pas agiter immédiatement. Laissez le verre reposer quelques minutes afin de favoriser un gradient d’arômes au-dessus du liquide. Les arômes les plus légers (comme la vanilline) peuvent se percevoir à quelques centimètres au-dessus du verre.
Procéder à la dégustation en plusieurs étapes

- Commencer par une observation visuelle si besoin (couleur, limpidité,..) (*)
- Première étape de l’analyse olfactive :
– Tenir le verre bien droit et approcher progressivement votre nez du liquide.
– Noter les arômes perçus (*) - Deuxième étape de l’analyse olfactive : Agiter le verre et recommencer l’analyse olfactive pour observer l’évolution des arômes, après aération.
- Dégustation au palais : Avant de porter le verre en bouche, mouiller légèrement votre langue pour préparer vos papilles et éviter un choc thermique lié à l’alcool.
Lors de la dégustation de whiskies, la dilution avec quelques gouttes d’eau peut être bénéfique : elle permet de révéler certains composés tourbés ou fumés et d’améliorer la rétro-olfaction.
Prendre quelques millilitres de liquide en bouche et évaluez les sensations perçues.
a. Acidité : sensation de fraîcheur, vivacité.
b. Astringence : sensation de sécheresse.
c. Sucrosité : perception du sucré ou du moelleux.
d. Amertume : légère ou intense, en fonction du spiritueux.
e. Arômes perçus : identification des notes aromatiques et de leur intensité en lien avec les matières premières et le processus de fabrication.
f. Persistance aromatique : durée pendant laquelle les arômes restent en bouche après la dégustation (courte, moyenne ou longue finale).
g. Rétro olfaction : phénomène olfactif qui se produit après la déglutition, lorsque les arômes remontent par voie nasale, permettant d’affiner la perception des nuances du spiritueux.
Inscrivez ces impressions sur votre fiche de dégustation
A la fin de cet article, vous trouverez en annexes, un exemple de fiche d’enregistrement de vos notes de dégustation et des exemples de listes de descripteurs, pour vous aider à affiner votre analyse sensorielle
Autres Recommandations
• Effet de l’ordre de dégustation : Les premiers spiritueux dégustés influencent la perception des suivants. Il est donc recommandé de commencer par les plus légers, en progressant du taux d’alcool le plus faible au plus élevé, afin de préserver la finesse des arômes. Il est également conseillé de rincer son palais avec un peu d’eau entre chaque dégustation pour éviter toute saturation des saveurs.
• En cas de tests comparatifs avec un échantillon témoin, les deux verres doivent être préparés simultanément afin d’éviter toute variation due à l’oxydation ou à la température.
Pour une analyse plus objective, il est recommandé de préparer deux verres témoins identiques et un verre contenant l’échantillon à comparer, ou inversement (test triangulaire). L’objectif est d’identifier lequel des trois est différent.
• Détection des composés soufrés : En cas de doute sur la présence de composés soufrés (odeurs de chou, œuf, allumette brûlée), vous pouvez réaliser un test au cuivre :
– Placer quelques pièces en cuivre (propres et non oxydées) dans un verre contenant le spiritueux, tout en conservant un second verre témoin sans cuivre.
– Couvrir les deux verres à l’aide d’un verre de montre ou d’une soucoupe et laisser reposer quelques minutes.
– Comparer ensuite les arômes en portant d’abord le nez sur le verre contenant le cuivre, puis sur le témoin.
Comment limiter le nombre de dégustation et préserver sa santé

La dégustation répétée et à grande échelle peut avoir des conséquences sur la santé.
Il est donc essentiel d’adopter des pratiques qui limitent l’exposition excessive à l’alcool.
Pour les eaux-de-vie, un premier tri peut être réalisé en s’appuyant sur l’analyse des composés volatils, complétée si nécessaire par une évaluation olfactive. Cela permet de présélectionner les échantillons avant de les juger, les noter ou envisager un assemblage.
OPTIMIX, logiciel de prédiction d’assemblage, permet de réduire le nombre d’essais avant la dégustation finale.
Pour le tester contacter Labox-apps.
Conclusions
Une dégustation bien menée permet non seulement d’apprécier toute la richesse d’un spiritueux, mais aussi de mieux comprendre sa complexité et au besoin d’en détecter les défauts.
En suivant ces bonnes pratiques, vous pourrez affiner vos perceptions et comparer plus objectivement vos impressions.
Bonne dégustation !
Article co-écrit par :
Evelyne CHANSON – Consultante en Contrôle Qualité Vins & Spiritueux – EC Consulting
et
Marc GIBOULOT – Oenologue et Expert en production de Vins et Spiritueux – MGCONSEILS W&CBSC
Cet article vous a plu, il suscite un besoin de complément d’informations, des correctifs, n’hésitez-pas à nous en faire part.
ANNEXES
Annexe 1 : Exemple d’un support d’enregistrement de notes de dégustation

Annexe 2 : Suggestion d’une liste de couleur de spiritueux

Annexe 3 : Liste des arômes par famille (liste non exhaustive) et support de notation de l’intensité perçue de ces arômes

Annexe 4 : Liste des principaux défauts organoleptiques (liste non exhaustive)

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